Maimouna Diakhaby est une jeune femme engagée. En 2008, alors qu’elle vivait encore à Montréal; elle co-fondait Afrikawaly (Organisme à but non lucratif) dans le but de contribuer au développement du continent Africain. Le projet principal d’Afrikawaly étant de construire une école dans le village de Troun (Mali), nul ne doute que l’éducation est une cause lui tenant à coeur.
Aujourd’hui, elle est à quelque mois de finaliser un MBA à la Harvard Business School. Vous constaterez par vous même qu’elle a déjà une idée très claire sur la façon de faire avancer l’Afrique, ce continent qui lui est si cher.
Je vous présente Maimouna Diakhaby, une femme exceptionnelle.
Photo Credit : MANIKMATI PHOTOGRAPHY
Maquillage fait par moi.
Présentes-toi en quelques phrases :
Impatiente, idéaliste, paresseuse, têtue sont des adjectifs que mes amis utilisent souvent pour me décrire. Je rajouterai gourmande et extravertie à cette liste 😉
Je suis née et j’ai grandi à Conakry avec 3 frères et sœurs. J’ai eu le privilège d’avoir des parents qui nous ont toujours poussés à voir un peu plus loin et à être curieux. J’ai ainsi décidé en 2006, de m’installer à Montréal pour mes études universitaires, et non à Paris comme la majorité de mes amis à l’époque. Après 8 ans au canada, j’ai poussé l’aventure encore plus loin en poursuivant ma formation avec un MBA aux États Unis.
Qu’est ce qui te motive à te lever le matin ?
Pour être tout à fait honnête, je ne me lève jamais toute pleine d’énergie le matin. Pour me motiver, j’ai pris pour habitude de me répéter des petits objectifs à atteindre à la fin de la journée et cela pendant de longues minutes. J
Plus sérieusement, j’ai toujours été extrêmement sensible à la pauvreté et aux défis qui m’entouraient en Afrique, et me suis toujours promis de contribuer à un changement positif en Guinée et sur le continent en général. J’ai eu le privilège de grandir dans de meilleures conditions que des millions de jeunes et crois fermement que tout privilège vient avec son lot de responsabilités. Mon objectif de vie est donc d’apprendre autant que possible afin de me rendre utile en Afrique, d’une manière ou d’une autre.
Je crois fortement au développement de l’Afrique par les Africains eux-mêmes. Je ne verrai probablement pas ce changement de mon vivant, mais me battrai pour que les prochaines générations en ait un aperçu.
Idéaliste donc comme je disais plus haut, mais plus activiste que rêveuse.
À partir du moment où tu t’es fixé comme objectif de faire le MBA de la prestigieuse université d’Harvard, quel est l’élément et/ou la personne qui t’ont aidé à réaliser cet objectif ?
Tout d’abord j’aimerai souligner l’influence de mon père dans l’établissement de cet objectif. Mon père m’a toujours poussée à me dépasser et à aspirer au meilleur. Durant ma dernière année en Guinée, il m’a offert un livre sur la Harvard Business School en me disant « les meilleurs cerveaux sortent de Harvard, il n’y a pas de raison pour que tu n’y sois pas un jour ». C’était donc naturellement que j’ai considéré Harvard dans mes applications lorsque j’ai commencé à me préparer pour un MBA en 2014.
Durant ce processus, j’ai reçu le soutien inconditionnel de ma famille et de mes amis. Le support d’une de mes meilleurs amies (elle se reconnaitra ;)) a toutefois été crucial. En me rassurant quand j’avais des doutes, me motivant quand je paressais et en relisant les 150 versions de mon dossier, elle m’a encouragée à aller au bout et à ne pas lâcher. Son soutien a été précieux et je lui en suis énormément reconnaissante. Encore aujourd’hui, elle joue un rôle important dans mon processus décisionnel.
Le support de notre entourage est essentiel dans la réussite de toutes nos initiatives. Lorsqu’on est bien entouré, aucune entreprise n’est trop ambitieuse.
Quels sont tes objectifs actuels et comment t’organises-tu pour les atteindre ?
A court terme, mon objectif principal est d’acquérir une expérience professionnelle qui me permettra de rentrer en Afrique avec un bagage intellectuel assez consistant pour faire une différence. J’aimerai toutefois atteindre cet objectif en établissant un équilibre sain entre vie de famille et carrière professionnelle.
Aujourd’hui, Ambition rime peu souvent avec Vie Personnelle. J’aimerai pouvoir briser ce cercle vicieux en allouant une place primordiale à ma famille et mon cercle social.
Depuis quelque temps, on entend souvent « Africa is the future », quelle est ton opinion sur ce nouvel engouement envers l’Afrique et penses-tu qu’il profitera aux africains ?
Cet engouement pour l’Afrique est avant tout bénéfique. Il veut non seulement dire que l’attention internationale se tourne dorénavant vers l’Afrique mais aussi que le continent n’est plus juste synonyme de misère ou de guerre. En voyageant à travers le continent cet été, j’ai pris la réelle mesure du potentiel économique du continent. Cependant, j’ai aussi constaté que les expatriés occidentaux et asiatiques sont les plus actifs dans la recherche d’opportunités en Afrique. La jeunesse africaine ne doit surtout pas manquer le train du développement en Afrique, au risque d’en devenir un témoin passif.
La renaissance de l’Afrique doit être pensée et exécutée par les africains eux-mêmes.
En tant que jeune femme guinéenne engagée et ambitieuse, qu’aimerais-tu apporter à ton pays ?
Deux choses me viennent clairement à l’esprit.
Tout d’abord, j’aimerai pouvoir mettre toute mon expérience et mes connaissances au service de mon pays. La Guinée est un pays magnifique avec un potentiel économique titanesque. Pour le réaliser, la Guinée a besoin de tous ces fils et filles. J’aimerai donc contribuer en y investissant ressources et connaissances dès que possible.
Le deuxième impact que j’aimerai avoir en Guinée est plutôt sur le plan social. Trop souvent, les jeunes guinéennes ne reçoivent pas le support (financier et moral) nécessaire pour atteindre leur plein potentiel. Cela est souvent dû à la conception sociétale qui les relègue à des rôles plus « féminins » de support ou d’observatrices. J’aimerais donc promouvoir une image différente de la Femme guinéenne : celle d’une femme forte, qui peut réaliser autant à la maison que dans la société.
L’éducation de la femme est un sujet qui me tient très à cœur. Je connais trop de jeunes filles brillantes qui n’ont pas eu les mêmes opportunités que moi. Cela doit changer.
La fuite des cerveaux est un phénomène qui coûte cher au continent africain, selon toi quelles mesures pourraient atténuer ce mouvement migratoire souvent sans retour ?
Nos dirigeants devraient tout d’abord commencer à écouter la jeunesse; lui accorder l’attention nécessaire pour mieux cerner ses besoins. Aujourd’hui, la majorité des lois visant la jeunesse sont conçues par des adultes de plus de 45 ans qui ne perçoivent malheureusement plus clairement les défis des jeunes du pays.
Par la suite, l’investissement dans des structures universitaires fortes permettra d’éviter que trop de jeunes n’émigrent à l’étranger pour poursuivre leurs études. La probabilité que ces jeunes restent dans leurs pays de formation est très forte.
Enfin la promotion d’un secteur privé dynamique permettra d’offrir du travail à ceux qui auront choisi de rester et d’attirer ceux qui se trouvent l’étranger.
Qu’est-ce qui te rend le plus heureuse ?
Je suis très extravertie et puise réellement mon énergie de mon entourage. Ma conception d’une journée remplie est celle qui me permet de rencontrer des gens d’horizons différents et aux visions totalement opposées à la mienne.
Je suis aussi une grande amatrice de chocolats. Une barre de chocolats résout tous les problèmes du monde à mes yeux 😉
Amour, Carrière, Famille. On a tendance à dire que les femmes doivent faire un choix parmi ces trois aspects importants de leur vie. Que penses-tu de cette pression qui pèse sur les femmes sur le plan social et personnel ?
Cette pression est réelle. La femme du 21e siècle a l’impression de ne pouvoir exceller dans un de ses aspects qu’au détriment d’un autre. Comment avoir une carrière épanouie tout en maintenant une vie de famille saine et heureuse? Les rares femmes qui semblent avoir relevé ce défi m’ont confié que la clef est de trouver un partenaire en symbiose avec nos ambitions et qui nous épaule dans nos accomplissements. Il faut néanmoins trouver son propre modèle en évitant de répliquer aveuglement ce qui semble fonctionner pour une autre famille.
Dans le monde du travail, les employeurs nord-américains sont de plus en plus accommodants et permettent souvent aux femmes d’avoir des horaires plus flexibles. Cependant il nous faudra attendre encore plusieurs années avant qu’une femme qui travaille occasionnellement de la maison ait les mêmes chances de promotion qu’un collègue masculin au même niveau.
Un dernier mot pour les lectrices de Jigeen ?
Keep fighting on all fronts; we are strong, beautiful and resilient
Merci Maimouna !!