Aujourd’hui j’ai l’honneur de vous présenter une femme determinée, et qui a su prendre sa place dans un milieu à prédominance masculine. Nafissa Diop Sylla est la Directrice de Casting de Marodi TV.
Pour celles qui ne connaissent pas Marodi TV, c’est une société de production audiovisuelle et cinématographique sénégalaise. Une société qui se démarque grandement dans l’Afrique francophone.
Je reviens à notre Jigeen, Nafissa.
Échanger avec elle a été un énorme plaisir pour moi. Elle fait partie de ces femmes qui ont compris que nous vivons dans societé où il est assez difficile pour une femme de vivre à la hauteur de son potentiel. Mais avec de la volonté, une vision claire et des actions concrètes; rien n’est impossible. Les choses peuvent changer. Lentement, mais sûrement.
And she understood the assignment !
Nafissa est une femme généreuse et remplie d’ambition pour les générations à venir. C’est une vraie visionnaire qui fait briller le leadership féminin.
Vous comprendrez très vite mon engouement. Alors sans plus tarder, voici Nafissa Diop Sylla.
Une femme d’exception pour en inspirer d’autres.
TRAITS DE PERSONNALITE
Pour être en paix il est important de tenir compte des mérites de chaque homme et respecter ce qui est dû à chacun.
Décris-toi en 3 mots
Affectueuse: Je suis une personne qui exprime son amour de toutes les manières possibles et imaginables. Très câline et émotive, l’affection est l’huile du moteur qui me permet de franchir tous les obstacles.
Optimiste: Voir le bon côté des choses peu importe la manière dont elles se présentent est une recommandation de notre Prophète Salallahou Aleyhi wa Salam. C’est un moyen efficace pour lâcher du lest et rester focus sur ce qui est important. Croire et ne voir que du bon chez les gens qui nous entourent pour avoir le cœur et l’esprit apaisés.
Prudente : Aujourd’hui plus que jamais j’avance par étapes et je fais attention à ne pas tout vouloir tout de suite, sans savoir où je mets les pieds. J’ai beaucoup travaillé sur moi-même pour arriver à la logique « prudence et beaucoup d’optimisme » et prendre le temps d’observer avant d’agir.
Qu’est-ce qui te rend le plus heureuse?
La relation que j’essaie d’établir chaque jour avec mon Seigneur. La spiritualité est primordiale pour parler de bonheur dans ma vie. Le monde avance, les jours passent , les heures ne nous attendent pas. On se bat tous les jours contre les tentations, on commet de plus en plus d’erreurs. Mais peu importe la douleur ou la tristesse qui m’envahit lorsque je m’en remets à ALLAH , mon cœur est rempli de joie … je suis heureuse.
Quelles sont les valeurs qui te sont le plus chères ?
Le respect: c’est la base du « vivre ensemble » car sans respect il n’y a pas de paix. C’est un principe qui intervient dans toutes nos interactions quotidiennes et une qualité essentielle dans toute relation.
La loyauté: c’est la qualité des Hommes bons, car ne jamais trahir la confiance de l’autre est une vertu. Le loyal peut se vanter de toujours avoir la conscience tranquille, même lorsqu’on ne lui rend pas forcément la pareille.
La justice: C’est une valeur universelle. A mon avis pour être en paix il est important de tenir compte des mérites de chaque homme et respecter ce qui est dû à chacun.
CARRIERE
Il fallait être très ouvert d’esprit et dynamique je pense que ce sont les atouts qui m’ont aidé à gravir les échelons rapidement.
En 2017, tu as intégré Marodi TV en tant que scénariste. Tu as participé à l’écriture de la saison 2 de Pod et Marichou. En 2018, tu étais LA scénariste de la série Nafi, et tu y as porté plusieurs casquettes. Notamment, celle de directrice artistique, responsable de casting et chef de projet. C’est une belle évolution en l’espace d’un an, et il est clair que tu as su faire tes preuves et prendre ta place. Selon toi, quels ont été tes atouts, en termes de compétences et de personnalité ?
J’évoluais dans un environnement bien cadré et très masculin donc il a vraiment fallu que je m’impose et que je défende mes idées. J’ai dû travailler deux fois plus que de coutume, carburer plus fort, et tenir bon pour prouver à l’employeur que je pouvais répondre aux attentes. Au début, ce n’était pas évident parce que j’étais très jeune et je n’avais pas d’expérience de terrain. La charge de travail était très lourde aussi bien physiquement, psychologiquement, qu’émotionnellement. Mais je suis restée concentrée et j’ai appris autant que je pouvais. Peu importe que l’astuce vienne du DG, d’un des scénaristes ou du réalisateur; lorsqu’elle était conforme au règlement je la notai dans un coin de mon esprit et je l’appliquais. Il fallait être très ouvert d’esprit et dynamique je pense que ce sont les atouts qui m’ont aidé à gravir les échelons rapidement.
Lorsque je suis arrivée à Marodi en tant que scénariste, j’ai dû travailler avec une équipe uniquement constituée d’hommes. Cinq hommes qui avaient de l’expérience et qui ne vivait que pour le cinéma.
Je suis sortie de ma zone de confort et j’ai pu prendre du recul, ce qui m’a beaucoup aidé lorsque j’ai été promu directrice de casting.
Toujours au sujet de ta carrière chez Marodi TV. En 2019, tu étais directrice de production sur la série Adja. Pour ensuite occuper le poste de Directrice de casting à partir de 2020. Je trouve rafraichissant et encourageant de voir une femme se démarquer dans un milieu qui me semble à prédominance masculine au Sénégal. Parle nous donc des obstacles que tu as pu rencontrer. Et comment les as-tu surmonté?
Lorsque je suis arrivée à Marodi en tant que scénariste, j’ai dû travailler avec une équipe uniquement constituée d’hommes. Cinq hommes qui avaient de l’expérience et qui ne vivait que pour le cinéma. Je n’ai pas été intimidée tout de suite parce que mes collègues m’ont vite mis à l’aise. Mais pour imposer son idée et son point de vue « féminin », c’était une autre histoire. Au début j’allais à la confrontation et je me renfermais lorsque le débat devenait houleux. Mais, à force de les côtoyer j’ai finalement choisi d’observer et apprendre de chaque situation. Le meilleur moyen de s’affirmer dans ce cas de figure, est d’argumenter avec conviction. J’ai eu la chance de travailler avec des personnes respectueuses, donc il n’y avait aucun écart de langage ou de comportement. J’étais vraiment libre de dire et faire ce que je pensais être le mieux pour le projet en cours. En tant que directrice de production sur la série « Adja » par contre, c’était tout autre chose parce que je devais gérer une équipe entière. J’étais le point commun entre l’équipe technique, les acteurs et l’administration. Toutes les failles me retombaient dessus. Je devais être la « maman » de tout le monde. C’est-à-dire taper sur les doigts en cas de besoin, rassurer lorsque c’était nécessaire et ne rien lâcher pour arriver à mes fins. Je suis sortie de ma zone de confort et j’ai pu prendre du recul, ce qui m’a beaucoup aidé lorsque j’ai été promu directrice de casting.
Marodi est une famille et lorsqu’un artiste veut intégrer cette grande et belle famille, il y a des critères sur lesquels on va s’appesantir plus que d’autres.
AMBITION
En tant que directrice de casting, tu t’es investie d’une mission allant au-delà de la sélection basique des actrices et acteurs. Tu as une vision très claire et je dirais même que l’ambition est un critère de sélection majeur pour toi. Peux-tu nous en dire plus ?
Avoir de l’ambition favorise la maturité de l’individu et accroît la confiance en soi.
Au fil du temps j’ai eu à faire avec plusieurs types d’acteurs, ceux qui s’investissent dans l’univers artistique par amour / passion, ceux qui veulent découvrir le milieu et qui sont animés par la curiosité, et ceux qui cherchent avant tout un moyen de subvenir à leurs besoins. Pour chaque type d’acteur il y a une façon particulière de l’aider à donner le meilleur de lui-même.
Avoir de l’ambition favorise la maturité de l’individu et accroît la confiance en soi. Ce sont deux qualités incontournables lorsqu’on veut « exploser l’écran ». J’insiste toujours sur le fait que pour moi, faire un casting ne se limite pas à recruter des acteurs. Il y’a un suivi à mettre en place. Je les accompagne autant que possible pour faciliter l’atteinte de leurs objectifs de vie. J’insiste sur l’importance des études, de l’ambition, de la responsabilité civique, de l’éthique et de ces valeurs qui vont avoir un impact dans la vie de tous les jours. Mais j’essaie aussi les mettre à l’abri au cas où leur carrière cinématographique devait pour une raison ou une autre s’achever.
Marodi est une famille et lorsqu’un artiste veut intégrer cette grande et belle famille, il y a des critères sur lesquels on va s’appesantir plus que d’autres. La cohésion d’équipe sur le plateau de tournage est primordiale pour qu’un projet sois mené à bien, donc nous nous assurons d’intégrer des acteurs qui partagent les valeurs de l’entreprise. Dans une logique de support et d’entre-aide nous sommes très souvent impliqué dans les activités annexes de nos acteurs. Par exemple pour nos acteurs écoliers ou étudiants on essaie de faire en sorte que le planning de tournage soit flexible, afin qu’ils puissent assister à leurs cours et se concentrer sur leurs révisions. Il s’agit là de mesures d’accompagnement que l’on a mis en place pour leurs permettre d’entreprendre, de travailler, d’étudier et de se perfectionner à leur guise, tout en restant concentré sur les tournages qui restent notre priorité absolue.
J’ai l’habitude de dire que nous avons un continent et surtout un pays à développer. Nous devons tous mettre la main à la pâte parce que personne ne le fera à notre place.
CONFIANCE EN SOI
il fallait briser les barrières psychologiques qui imposent à nos femmes que la beauté est limitée ou cadrée, ce qui, pour Afi comme pour moi, est complètement faux.
Concernant les critères de sélection liés au physique, on voit clairement que la beauté naturelle est de mise. Je prends l’exemple des quatre actrices principales de la série Karma, qui ont chacune un beau teint naturel. A travers Yakhara Gueye, Seynabou Gueye, Roselyne Sylla et Diariatou Sow, vous (Afi et toi) nous avez montré une certaine diversité de la beauté féminine Sénégalaise; je dirais même Africaine. Quel est le message à travers ce choix d’actrices ? Et Combien de temps avez-vous travaillé sur ce casting ?
Partout dans le monde, il existe des stigmatisations liées au genre. La femme est malheureusement celle qui en souffre le plus. On ne s’en rend pas compte mais on en demande beaucoup à la femme et surtout à la femme Africaine. Lorsqu’il s’agit d’un rôle pour un projet précis, mon opinion seul ne peut prédominer. J’ai eu la chance de rencontrer Afi, scénariste de la série karma avec qui je partage la même vision concernant la place de la femme dans la société et en l’occurrence cette envie d’encourager les femmes à s’accepter telles qu’elles sont. On a voulu mettre les femmes sénégalaises en valeur mais Il faut savoir que pour mener un casting à bien, je me base sur une description des personnages précise dans laquelle le scénariste m’explique clairement sa morphologie, son trait de caractère, ses mimiques… . Les détails les plus anodins pour le téléspectateur sont les plus importants en casting parce que rien n’est fait au hasard.
Afi a tenu à changer la donne, à montrer aux jeunes femmes qu’elles sont belles toutes autant qu’elles sont: Claires de peau comme Amy lèa et Maï ou au teint foncé comme Ndeye Marie et Virgine. Elles sont magnifiques.
le « geum seu bop »
L’importance était d’insister sur la prestance et l’assurance qu’elles dégageaient le « geum seu bop ». On voit d’emblée à l’écran qu’elles ont beaucoup de confiance en soi et surtout qu’elles sont très « supportives » les unes avec les autres. C’est un tout, il fallait briser les barrières psychologiques qui imposent à nos femmes que la beauté est limitée ou cadrée, ce qui, pour Afi comme pour moi, est complètement faux.
Plusieurs actrices que l’on retrouve dans les séries de Marodi TV viennent contrer la quasi invisibilisation des femmes au teint foncé dans pas mal de séries sénégalaises. Je pense à Yakhara et Seynabou Gueye, ainsi qu’Armande Lo et la charismatique Amelie Mbaye. Ces choix d’actrices peuvent-ils s’inscrire dans une sorte de lutte contre la dépigmentation artificielle de la peau ?
Autant nos pays avancent économiquement, culturellement autant les mentalités doivent accompagner cette évolution.
La lutte contre la dépigmentation est d’abord un combat personnel. Pour moi, la dépigmentation de la peau est regrettable. Par contre, en tant que fédératrice, je n’ai pas le droit d’écarter dans ma pré-sélection une actrice dépigmentée si la description du personnage ne le stipule pas clairement. Néanmoins, du point de vue sanitaire et au vu de toutes les conséquences néfastes qu’elle génère, je peux dire qu’on a vraiment fait tout notre possible pour dissuader nos actrices de s’adonner à cette pratique.
On privilégie le naturel, c’est un fait, parce qu’aujourd’hui nos mentalités ont évolué. Et notre vision du monde avec. Nous ne sommes plus enchainés et nous avons appris à nous aimer tel que nous sommes. Cette vision d’un « melting pot mondial » doit se faire à notre niveau en acceptant la différence, parce que c’est « la différence qui est jolie » pour reprendre Salif Keita.
Les femmes de ce pays assument leur authenticité et c’est un plaisir de pouvoir les booster et leurs donner le courage d’affronter les préjugés. Tout ceci résulte d’une oppression psychologique exercée depuis mathusalem sur nos populations et autant nos pays avancent économiquement, culturellement autant les mentalités doivent accompagner cette évolution.
Être née femme est un privilège que l’on n’exploite pas suffisamment. Nous sommes capables de faire tellement de belles choses avec de la conviction, de la hargne et de l’amour.
SURMONTER LE DOUTE
T’arrive-t-il de douter de toi ? Si oui, que fais-tu pour surmonter tes moments de doute?
Bien sûr comme tout le monde, et surtout dans un milieu professionnel qui évolue très rapidement. J’ai été confrontée à des situations qui m’ont fait douter de mes capacités à diriger un département aussi important. Mais heureusement , je ne me focalise jamais sur les point négatifs. Ma motivation fait que lorsque je trébuche, j’ai de solides points sur lesquels m’appuyer pour me relever et repartir de plus belle.
Quelle est ta plus grande fierté ?
Ma famille en général. J’ai une relation très particulière avec mes parents, mes frères et sœurs, mais aussi avec mon époux et ma belle-famille. C’est clairement un privilège pour moi de pouvoir compter sur eux tout le temps, sans aucune exagération. Je suis très fière de ce beau monde qui m’entoure, m’épaule, partage mes délires, me raisonne, me motive, m’aime tout simplement sans rien attendre en retour.
UN DERNIER MOT
Bienvenue dans la communauté Jigeen. Qu’aimerais-tu dire aux autres femmes qui nous lisent ?
VOUS ETES DES REINES et ne laissez rien ni personne vous faire croire le contraire. Battez-vous et ne lâchez rien ! Être née femme est un privilège que l’on n’exploite pas suffisamment. Nous sommes capables de faire tellement de belles choses avec de la conviction, de la hargne et de l’amour. On pourrait faire bouger le monde. Aidons-nous les unes les autres à aller de l’avant, à gagner, à conquérir, à diriger, à fleurir, à réussir. Tant que nous aurons des objectifs clairs et qu’on reste focus sur l’essentiel on peut tout casser!