Dorothy Rhau est une femme persévérante qui a su prendre sa place dans la scène humoristique du Québec. Elle est récipiendaire du prix Women Inc 2014 « femme inspirante » , lauréate du trophée « Best entertainer 2014 » au Black Canadian Award et a même été invitée par le président d’Haïti en personne pour offrir un spectacle l’année dernière. Ce pigeon voyageur avec sa joie de vivre comme passeport ne se limite pas au Québec et se fait de plus en plus connaître à l’étranger notamment en Afrique de l’Ouest, elle est décidément prête à conquérir le monde !
Découvrons ensemble cette “SUPERWOMAN” !
Peux-tu te décrire en 3 mots ?
Authentique: What you see is what you get 😉 Je suis une anti-superficielle, allergique à l’hypocrisie mais oui, il m’arrive de porter de faux cheveux 😉
Forte: Mon sourire est un signe que je suis forte. Malgré les difficultés rencontrées, les égratignures, les déceptions, les refus, les portes fermées, les mauvaises langues, la jalousie, le rejet, le découragement…venant des proches et d’ailleurs….ça me motive!
Humaine: Je n’oublie pas d’où je viens. J’observe, j’écoute ce qui se passe autour de moi et dans le monde. Je ne reste pas insensible. J’ai toujours dit, plus je recevrai de la vie…plus je donnerai. Plus on me verra, plus je serai là…auprès des gens qui en auront besoin. Je choisis mes causes.
À l’âge de 37 ans, alors que tu étais conseillère en RH, tu as décidé de fermer le chapitre bureaucratique de ta vie pour te lancer entièrement dans une carrière d’humoriste. Qu’est ce qui t’as donné le courage de prendre ce défi ?
Mon fils avait 4ans. Après lui avoir donné le bain, en tentant de lancer la serviette sur la barre….elle m’est tombée sur la tête. Il a ri. J’ai persisté à faire le clown…il riait aux larmes. Ça été le moment déclencheur, malgré qu’on m’ait presque harcelé pendant dix ans à faire de l’humour….ce moment précis a été décideur.
Quels sont les plus gros obstacles que tu aies rencontré et comment les as-tu affronté ?
Moi! M’auto-discipliner, combattre contre la procrastination. Je me suis armée de plusieurs cahiers qui comprennent ma to do list quotidienne. Et il n’est pas rare que je consomme un clip ou que je lise un livre de motivation question de recharger mes batteries. Et il y a les finances. Je n’aime pas être l’esclave de l’argent, je dois être le maître! Solution…me mettre à la couture!!!
Quel est le plus bel accomplissement de ta carrière en date d’aujourd’hui ?
Être encore là…dans l’humour et faire rire les gens. Je me vois à 85ans sur la scène 😉
D’après un sondage effectué sur 175000 adultes pour Femmessor-Montréal (une organisation dédiée au soutien à l’entrepreneuriat féminin), les femmes manqueraient plus de confiance en elles que les hommes pour démarrer leur entreprise. Toi qui es dans un milieu à prédominance masculine, quel est ton avis sur ce sujet ?
Lorsque j’était jeune, on me choisissait souvent comme chef d’équipe en sport car je n’avais pas peur d’affronter les garçons. Pourtant, si on regarde mes photos lorsque j’étais petite, ma mère me pomponnait. Les femmes de ma famille, m’ont toujours dit que j’étais jolie et m’ont montré comment être fière de marcher sur des talons aiguilles!
La confiance en soi et l’estime de soi s’enseignent dès le plus jeune âge. Malheureusement, beaucoup de femmes doutent d’elles-mêmes et n’assument leur féminité. Elles hésitent souvent à se tailler une place dans leur milieu respectif parce qu’elles sont femmes et n’osent pas être en compétition avec un homme. Je ne suis pas surprise que cela ait des répercussions sur la volonté de démarrer une entreprise. Par contre, il ne faut pas oublier que lorsque l’on devient mère…le choix de devenir travailleuse autonome devient plus difficile.
Faites-vous confiance, oui on tombe, oui on se fait mal…mais ça va passer et au contraire, on devient plus vigilante et expérimentée.
Peux-tu partager avec moi un moment de ta vie où tu as vraiment du sortir de ta zone de confort ? Et qu’en as-tu tiré ?
Je suis sortie de ma zone au moment où j’ai pris la décision de suivre le cours de présentation d’un numéro à l’École Nationale de l’humour. Ce n’était pas évident parce que je devais me battre contre mon éducation féminine et culturelle. Ensuite, lorsque j’ai plongé à temps plein dans ma carrière d’humoriste. Ce qui veut dire…laisser un salaire, des avantages sociaux, alors que j’étais nouvellement mère monoparentale….tout ça pour faire rire les oiseaux!
Je n’ai aucun regret. Au contraire, bien que n’ayant pas encore trouvé complètement ma vitesse de croisière, je peux me considérer heureuse d’avoir fait ce choix. Premièrement, je me sens comme un oiseau libre…le bonheur d’être maître de son temps est incommensurable. Je n’ai pas à m’expliquer pour un congé de maladie, faire de demande pour des vacances, ancienneté…bla bla bla. FINITO! Je dépose et je vais chercher tous les jours mon fils. Passez du temps avec mon fils…ça n’a pas de prix. Je suis mon propre boss ce qui veut dire aussi j’assume pleinement les bons et mauvais coups.
Deuxièmement, ENFIN, je peux déployer mes ailes. Je me sens comme un poisson rouge qui peut grandir à sa pleine capacité. Personne ne peut oser dire que j’ai volé sa place ou sa promotion.
Une fille comme moi ne cherche pas une zone de confort….j’aime trop relever des défis. Je me savais forte, mais là, j’en ai la preuve.
On dit que l’humour adoucit les mœurs. Transmets-tu des messages à travers ton humour ? Si oui, lesquels te tiennent le plus à cœur ?
Oui. Souvent sur scène. Dans mon premier one woman show, j’ai fait rire sur le châtiment corporel, donc la fessée. Dénoncer le préjugé de couleur qui est présent chez les Noirs…. Mais aussi, je véhicule un message via mon apparence et mes photos. Montrer l’autre visage de la femme Québécoise: #diversité #BlackIsBeautiful #estimedesoi #êtrebiendanssapeau….et bien sûr #40sIsTheNew20s. On cherche tous des visages auxquels on s’identifie….malheureusement, la diversité n’est pas encore assez présente à la télé ou sur les couvertures de magazine d’icitte. C’est important pour moi de faire bonne figure surtout devant les jeunes filles issues des communautés culturelles.
Tu dis souvent que « si on a la peau foncée, c’est pour foncer et défoncer les portes ». Qu’aimerais-tu que l’on retienne de cette phrase inspirante ?
Faut prendre sa place! Nos prédécesseurs nous ont fait comprendre que c’est pour défendre la couleur de leur peau qu’ils se sont battus, qu’ils ont perdus des vies, pour devenir des citoyens libres et ayant des droits. Aujourd’hui, oui, le racisme, la discrimination, existent, mais il faut les voir comme des incitatifs. Je sais que cela peut être épuisant mais on ne doit pas le faire juste pour nous, il faut penser au prochain qui va envoyé son cv, celle qui va appelé pour un logement ou pour ce jeune assis devant un conseiller en orientation qui saura le guider sans le juger à sa couleur. C’est un combat qui n’est pas loin de finir, mais c’est notre devoir.
Quels sont tes projets à venir ?
À court terme, mon deuxième one woman show et faire une tournée au Canada Français. Poursuivre ma conquête vers la Francophonie. Ensuite…to do stand up comedy in english only. J’suis sûre qu’on aimerait bien ma face aux États-Unis. Plus loin des projets d’écriture pour la télé et pour le cinéma. Et très bientôt j’espère, quitter le domicile de ma mère pour aller vivre chez moi. Fonder une autre et dernière famille avec mon homme. Shuuuut 😉
Parlons un peu de style Dorothy ! Tu ris de beaucoup de choses mais tu ne badines pas avec ton style vestimentaire..Tu es une vraie fashionista qui assume complètement sa féminité dans un milieu où l’on ne s’y attend pas. Comment le vis-tu ? Et quel conseil pourrais-tu donner aux jeunes filles ou femmes qui pour des raisons différentes peuvent avoir peur d’exprimer leur féminité ?
Hahaha! Je le vis très bien et de manière naturelle. C’est en moi! C’est mon éducation, c’est une de mes valeurs intrinsèques! Tantôt je peux avoir un look très ghettogirl…limite « Je m’enfoutiste ». Et quand je m’habille…attention…Madame Rhau passe! Et ce….de la tête aux pieds 😉
La beauté s’exprime par l’assurance et l’attitude. Et non par votre silhouette, un joli minois ou la marque de vos vêtements. Croire si fort en soi qu’on ne peut se laisser intimider ou influencer par quoique ce soit fera jaillir notre beauté. Exemple : arriver en robe de nuit à une soirée chic et faire croire que ce n’en est pas une! Remarquez ces filles qui portent des faux cheveux ou de fausses griffes….leur attitude est tellement imposante qu’on croit que tout est vrai. 😉
Merci Dorothy !
Maquillage : Miss Deisy
Chaussures et sac à main : Fantex
Trench coat : Adama Paris