Virginie Ehonian (fondatrice d’African links) partage son histoire avec le continent Africain

Peux-tu te décrire en 3 mots ?

Procrastinatrice : « Qui remet toujours à demain trouve malheur en chemin ». Je remets trop souvent à plus tard les choses à faire. Qui sait ? Peut-être que je serais millionnaire aujourd´hui si je parvenais à m’organiser rigoureusement pour mette en place mes projets perso. (rires)

Indécise : Thé? Capuccino ? Ou chocolat au lait? J’y vais en métro? En bus? En voiture? J’y vais ou j’y vais pas? Je mets des baskets ou des talons? Tant d’interrogations qui parasitent mon quotidien…

Marrante : on dit que je fais rire.. Il m’arrive tant de choses au quotidien qu’il m’est impossible de ne pas lâcher un sourire chaque jour. Je ne suis pas folle mais je rigole pas mal toute seule. (rires)

Quelle est la qualité qui d’après toi t’as le plus permis d’évoluer dans la vie ?

Ce n’est pas une qualité mais plutôt un défaut. Je suis assez susceptible donc à la moindre remarque, je me remets en question. Avec le temps je suis parvenue à faire la part des choses pour ne me nourrir que des remarques les plus constructives et progresser.

Quelle est ta plus grande source de motivation ?

Ma mère, pour son courage et sa persévérance. Elle a su me montrer ce qu’était  la rigueur et la détermination.

Quel a été ton premier lien avec la Côte d’Ivoire  qui est ton pays d’origine?

Les cassettes vidéos VHS que des amis de mes parents nous rapportaient de Côte d’Ivoire ..Et oui, vraiment à l’ancienne. C’étaient des enregistrements de la TV ivoirienne, la RTI. J’ai connu mon pays d’origine à travers la musique et les séries théâtrales qui étaient les ancêtres de “Ma famille”.

La musique a joué un rôle important, quand je retrouve certaines chansons aujourd’hui sur Youtube j’en suis presqu’émue et nostalgique!

En tant que française d’origine ivoirienne,  comment tes parents ont-ils contribué à ta connaissance de la Côte d’ivoire ?

En payant mes billets d’avions (rires)

Ils m’ont aussi transmis à travers leurs souvenirs, leurs vécus et leurs opinions, des bribes de l’histoire de la Côte d’Ivoire.

Et cet échange inter générationnel est essentiel dans les rapports parents – enfants car c’est autour de cela que se cristallisent et se dessinent des ambitions ainsi que des trajectoires personnelles et professionnelles.

Tu es née et a grandi à Paris, si tu te rappelles de la première fois que tu t’es rendue sur le continent africain, peux-tu partager cette expérience avec nous ? 

Aéroport Félix Houphouët Boigny (Côte d’Ivoire), le 27 juillet 1998. Je reconnais dans la foule, après un long quart d’heure d’attente, l’une de mes deux tantes venues me chercher à l’aéroport. Je pleurais parce que je ne les voyais pas arriver. Ma tante invective le douanier qui lui répond : « Est-ce- qu’elle est bébé? » (rires).

Mes parents avaient tout organisé de mon voyage. Je partirai avec un ami de mon père, et je resterai pendant un mois chez ma tante à Williamsville, dans le quartier de Paillet. Je rencontrais alors toute ma famille, mettais des visages sur des noms. Et je regardais enfin la RTI en direct ! Je me souviens des longs trajets pour aller jusqu’à Grand-Bassam, et les bons petits plats de ma Grand-mère.

C’était comme un rêve devenu réalité.

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Tu as vécu 6 mois au Sénégal dans le cadre de tes études en art, qu’as-tu retenu de ce séjour ?

La folie des chauffeurs de taxis! (rires)

Plus sérieusement, passer six mois à Dakar m’a fait comprendre que vouloir monter un projet en « Afrique » c’est bien, mais s’adapter aux réalités locales, c’est mieux! Dakar n’est pas Abidjan, comme Paris n’est pas Berlin!  Certes, les villes africaines présentent des difficultés et des contraintes similaires, mais les réalités ne sont pas les mêmes, et il est important de le comprendre.

Ça me fait rire quand les gens me demandent (encore) qu’est-ce que je suis partie faire au Sénégal pendant six mois en 2013 : « Pourquoi t’es pas partie au US, à Londres pour faire ton stage ? ». Et bien, Marie-Laure Croizier de Lacvivier, une femme franco-sénégalaise m’a dit un jour glacé de janvier 2012, que si je m’intéressais à l’Afrique et que je voulais œuvrer pour elle, le Sénégal était la 1ère étape. Donc je m’envolais pour Dakar un 23 janvier 2013, loin de tout ce que j’avais pu entendre, évitant les échos des préjugés comme des balles de ping-pong ou de golf lancés par les plus incultes..

Cependant, je valide la théorie de la Téranga sénégalaise!

En 2011, tu as crée ton Blog african links (http://africanlinks.net) et aujourd’hui, des artistes connus et engagés tel Didier Awadi te suivent et t’encouragent sur les réseaux sociaux.  Peux-tu faire une présentation de ton projet african links en expliquant ta mission ?

African links marque mon envie de promouvoir les différentes initiatives publiques et/ou privées  relatives aux thématiques africaines ou afrodescendantes à  Paris et ailleurs en France. J’y croise des réflexions personnelles: mon opinion sur un fait social, un programme à la TV, ou encore un évènement artistique particulier qui m’a marqué; tout en faisant des ponts entre les différentes disciplines, avec toujours comme point central l’art.

Je ne sais pas si j’ai vraiment une mission.  African links me permet de m’exercer sur le plan de l’écriture et de la rédaction, d’élargir mon réseau, mais surtout le fait de tenir un blog me pousse à me tenir informée  de ce qui se passe  en France et à l’étranger sur les plans géopolitique, économique et culturel. Je le définis comme un espace alternatif, qui suit l’actualité avec une certaine distance. Je ne vais pas me sentir obligée d’écrire sur un sujet parce que c’est la tendance…

De voir un simple « like » ou un-e chanteur-euse que j’apprécie, me suivre sur les réseaux sociaux, suffit à me combler et à m’encourager à poursuivre sur ma lancée. C’est avec un large sourire que je découvrais alors que Didier Awadi, Mélissa Laveaux ou encore Stevy Mahy suivaient mon blog à travers différents canaux : pas de mots… Mais un réel sentiment de satisfaction.

Virginie, tu es une amoureuse inconditionnelle de l’Afrique et de sa richesse culturelle. Pourtant, tu n’y a jamais vraiment vécu; comment as-tu développé ton attachement et ton engagement envers ce magnifique continent ?

J’ai toujours eu un intérêt et une fascination pour le continent aux 54 pays. Une curiosité sans limite. Je l’ai compris à 9 ans, lorsque ne parvenant pas à représenter les drapeaux des Etats-Unis, de l’Angleterre ou du Canada, sur la page de garde de mon cahier d’Anglais, je dessinai alors ceux du Nigéria, de la Sierra-Leone, du Ghana et de la Gambie. Et à la seule élève de sa classe de CM1 qui avait opté pour dessiner les drapeaux des pays africains, l’enseignante s’exclama : « Oh ! Wonderful… Oui, il y a des pays en Afrique où l’on parle anglais aussi. »

« Africa », l’Afrique n’avait pas du tout la cote dans les années 1990. Les artistes étouffaient sous nos sacs de riz que l’on rapportait à l’école, les cadavres des guerres et tueries s’empilaient sur les poèmes et les livres des intellectuels africains. Que de maux dont souffre l’Afrique ! Et l’éclat de son rayonnement culturel se ternit sous le poids d’une corbeille de fruits exotiques devenue trop lourde pour sa tête, son cou.

Les évènements post électoraux qui ont secoué la Côte d’Ivoire ont renforcé mon sentiment patriotique. Je voulais tout savoir, j’apprenais la géographie et mémorisais les villes les plus importantes, revoyais le vocabulaire de ma langue (le Nzima) : « Lorsque tu ne sais pas où tu vas, regarde d’où tu viens. » (proverbe d’Afrique du Sud). Mais c’est mon stage dans un cabinet d’art africain contemporain, en 2010 qui a signé l’apogée de mon engouement pour les thématiques propres à l’Afrique. J’ai pris conscience qu’une réelle scène artistique existait, et qu’il était nécessaire de la promouvoir à mon échelle.

Concernant ton  développement personnel, en quoi ton projet african links t’a-t-il été bénéfique ?

African links m’a rendu plus rigoureuse, et m’a permis de mieux m’adapter à certaines exigences professionnelles. Tenir un blog, aujourd’hui, c’est un peu comme présenter un passeport du 21ème siècle : ça plaît ou ça ne plaît pas, mais entre confiance en soi et réaffirmation de soi; african links est ce qui m’a poussée à me définir et à étayer mes propres réflexions.

Quel est ton plus grand rêve ?

Être la Oprah Winfrey afropéenne : elle symbolise à mes yeux la réussite de la femme africaine- américaine !  J’ai encore du chemin à faire (rires!)

Que retiens-tu de ton échange avec Jigeen ?

Des questions pertinentes qui font remonter à la surface de profonds sentiments. C’était nécessaire que de se plier à l’exercice de répondre à ces questions. Jerejef! *

*Merci en Wolof

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Fama
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Founder and Editor in Chief

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